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observatoire de la guerre en IRAK
observatoire de la guerre en IRAK
26 septembre 2007

Histoire du Koweït

Le Koweït, pièce du jeu américain

extrait du prochain livre de D. Gorteau, Comprendre la guerre en Irak.

            Chacun se souvient de l’invasion du Koweït par l’Irak le 2 août 1990. La propagande anti-irakienne visant à justifier la guerre a masqué l’histoire de ce minuscule Etat qui, avec l’Iran, restreint largement l’accès à la mer de l’Irak.

            Comme tous les Etats de la région, la naissance officielle du Koweït est liée aux manœuvres franco-britanniques dans la région à la fin de la première guerre mondiale. Suite aux accords entre Paris et Londres sur le démantèlement de l’empire ottoman, le jeune Koweït devient un élément du système britannique dans la région.

            Mais avant la première guerre mondiale l’émirat était déjà sous la domination de Londres. En effet, dès 1899 l’émir local se place sous la protection officielle de la Compagnie des Indes, l’instrument de l’empire britannique. A cette époque le Koweït est rattaché à l’Irak, espace lui-même contrôlé par les Turcs. Pour échapper à cette tutelle à la fois lointaine et pesante la dynastie régnante à Koweït ville s’allie aux Européens. En 1913 une convention anglo-turque reconnaît même cette « protection » de Londres. La défaite de l’empire ottoman ne peut que finaliser ce projet d’intégration du Koweït à l’empire britannique.

            Dans les années 1920 la jeune Arabie Saoudite tente de le conquérir, mais le « protecteur » empêche la manœuvre d’autant plus vite qu’on soupçonne la présence d’importantes réserves de pétrole, élément sans grand intérêt pour les populations locales, mais source d’énergie indispensable à l’Occident.

            En 1938 les premiers puits de pétrole sont découverts et à partir de 1946 une compagnie américaine les exploite à grande échelle.

            Pour l’Irak qui s’achemine vers l’indépendance à cette période le Koweït reste une province irakienne que les Britanniques ont arraché à l’Irak dans le but de diviser l’empire ottoman avant d’amputer l’Irak d’une province riche de 10 % des réserves mondiales de pétrole (soit l’équivalent de l’Irak).

            De plus, garder un Koweït séparé du reste de l’Irak permettait aux Britanniques de diviser un Irak potentiellement puissant. De plus, les frontières mêmes du Koweït limitaient l’accès à la mer de l’Irak, c’était un autre moyen de pression. Les nationalistes irakiens de Kassem à S. Hussein n’auront de cesse de revendiquer ce territoire où règne le même système tribalo-féodal qu’en Arabie Saoudite.

            Imposées par décret impérial britannique, les frontières entre l’Irak, l’Arabie Saoudite et le Koweït seront contestées par l’Irak jusqu’à l’invasion de 1990.

            En 1961 Londres daigne accorder l’indépendance à l’émirat qui reste plus que jamais un pion pro occidental dans la région. En 1963 un accord avec l’Arabie Saoudite partage les revenus pétroliers de la zone contestée dite « zone neutre ».

            Suite aux chocs pétroliers le Koweït suit le mouvement de l’Arabie Saoudite : l’enrichissement considérable et fulgurant du pays entraîne une modernisation apparente du pays qui achète massivement des produits industriels occidentaux tout en s’alignant sur Riyad pour la politique étrangère, c’est à dire en soutenant l’Irak contre l’Iran révolutionnaire à partir de 1980. Tout comme sa voisine le Koweït redoute par dessus tout un soulèvement de sa minorité chiite brimée par un émirat sunnite orthodoxe. Dans les années 1980 des attentats revendiqués par des organisations chiites peut-être soutenues par Téhéran entraîne l’expulsions de milliers de koweïtiens chiites.

            En 1986, agacé par un parlement aux pouvoirs pourtant très restreins l’émir Jaber al-Ahmad al-Sabbah dissout l’assemblée et gouverne par décrets.

            Après la fin de la guerre entre Bagdad et Téhéran le Koweït revient à une indifférence agressive vis-à-vis de l’Irak. En effet le Koweït refuse d’annuler les dettes de guerre contractées par les Irakiens tant que Bagdad refusera de reconnaître les frontières imposées par les Britanniques. De plus le pays dépasse notoirement ses quotas de production pétrolière ce qui entraîne une baisse des prix du pétrole et handicape la reconstruction de l’Irak. Pour finir, l’Irak accuse le Koweït de forer sous la frontière.

            Convaincu de la mauvaise foi de l’émirat, espérant la neutralité de Washington et pensant que l’URSS soutiendrait ce coup de force S. Hussein envahit le Koweït sans difficulté et annexa le pays en tant que « 19° province » de l’Irak.

            Sur place la résistance existe, mais reste faible, des milliers de koweïtiens ont fuit à l’étranger et sur place les centaines de milliers de travailleurs arabes (60 % de la population) se trouvent à la fois sans travail à cause de l’embargo de l’ONU mais aussi libérés d’un système quasi-esclavagiste. Sur place des groupes palestiniens[1] aident même l’armée irakienne.

            En janvier et février 1991 la coalition menée par les Etats-Unis libèrent le pays de l’armée irakienne et restaure le régime de l’émir Jaber qui ne se presse nullement de démocratiser son régime. Des milliers de Palestiniens collectivement accusés d’avoir collaboré avec l’occupant sont expulsés[2].

            Depuis 1991 le Koweït est le pays de la région le plus proche des Américains, il servira de base pour l’invasion de l’Irak en 2003.

            En 1992, une commission de l’ONU très influencée par les Etats-Unis rectifient la frontière irako-koweïtienne en faveur de l’émirat. Une façon de pousser l’Irak à la faute, mais dans les années 1990 S. Hussein reconnaîtra cette nouvelle frontière malgré son caractère inique.

            Sur le plan intérieur le vieil émir finit par accepter l’élection d’une nouvelle assemblée élue par moins de 15 % des habitants puisque pour voter il faut être un homme koweïtien depuis au moins 20 ans et ne pas travailler dans la police ou l’armée... En 2005 les Femmes obtiennent néanmoins le droit de vote ce qui ne change rien aux rapports de forces politiques.

            Ce parlement sans réels pouvoirs tente tout de même d’encadrer à défaut de réduire les pouvoirs de l’émir : libéraux, islamistes et élus chiites obtiennent peu de choses.

            En janvier 2006 l’émir Jaber décède à l’âge de 77 ans et est remplacé par son cousin de 75 ans.

            Création de l’empire britannique puis allié des Etats-Unis dans la région le Koweït est à l’image de l’Arabie Saoudite coincé entre ses réserves pétrolières qui le lient à l’Occident et le caractère illégitime de l’Etat géré par un clan féodal adversaire de tout progrès tant vis-à-vis de sa population que vis-à-vis de sa main d’œuvre étrangère.


[1] C’est le cas du FLP (Front de Libération de la Palestine) de Abbou Abbas, arrêté et tué par les Américains à Bagdad en 2003.

[2] De même des Jordaniens sont expulsés malgré les protestations des organisations de défense des Droits de l’Homme complètement oubliées après leur dénonciation de la dictature de S. Hussein après l’invasion du Koweït...

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